Le temple de Karanis, datant des Ptolémées est dédié à un des dieux les plus insolites du panthéon égyptien : Pnéphéros, une divinité tardive tout à la fois crocodile et visage royal.
Situé à 76 km au sud du Caire dans la direction du Fayoum, les vestiges du temple de forme rectangulaire se dressent sur le site de Karanis (l’actuelle Kôm-Ouchim). On y trouve aussi les ruines d’une ancienne ville gréco-romaine présentant un réseau complexe de maison en brique crue.
Karanis, ville gréco-romaine

Les premières fouilles du site furent menées par l’université du Michigan en 1924. Elles permirent de mettre à jour les ruines d’une petite bourgade construite sur une butte à l’abri de l’inondation. On a retrouvé à l’intérieur maint ustensiles de la vie quotidienne des habitants de l’époque : paniers, boites, hameçons, plats, lampes, céramiques diverses, etc, ainsi que quelques monnaies romaines.
La ville vivait apparemment de la culture du papyrus, abondant dans cette région marécageuse, mais aussi de l’agriculture ( fruits, légumes et céréales ), de l’élevage, de la chasse et de la pêche dans le lac voisin.
Le temple
Le bâtiment fut construit en plusieurs étapes pendant la période tardive. Son plan suivait un axe ouest-est. Il ne fut peut-être jamais terminé. Une enceint de brique l’entourait dans laquelle on accédait par un propylône aux fondations de pierre s’ouvrant sur le coté est.
On accédait, par une allée pavée, à la cour péristyle qui donnait sur le sanctuaire proprement dit. Un hall d’entrée donnait sur différentes allées latérales ainsi qu’un escalier qui permettait d’accéder à une terrasse. Le vestibule à offrande se trouvait à l’ouest du temple ; il communiquait avec les magasins du sanctuaire. De cet endroit un deuxième escalier menait lui aussi à la terrasse. Ces deux escaliers jouaient un rôle dans la célébration de certaines fêtes.
Les crocodiles

Le temple était dédié au culte d’un couple de crocodile, divinité locale commune à différent site du Fayoum. Selon les endroits on les appelait Soknopaio, Sokonois ou encore Psosnaus, « les deux frères ».
A Karanis ils portaient les noms de Pétésoukhos et Pnéphéros. La transcription grecque de ce dernier, de l’égyptien pa-néfer-her se traduit par « celui au visage parfait » Il s’agit d’une simple épithète susceptible d’être appliqué à différents dieux, qui peut être interprété comme « bienveillant » ou « beau » suivant le contexte. Il fut aussi attribué à Sobek, le dieu tutélaire du Fayoum dès l’époque d’Amenemhat III. On retrouve cette épithète par exemple dans l’hymne du papyrus Rameséum IV.
Cette épithète, renvoyant à la notion de frontalité, revêtait un sens particulier dans les conceptions religieuses égyptiennes. L’idée de représenter un dieu de face, et non de profil, est assez rare dans le système graphique égyptien. Cette symbolique représente la disponibilité du dieu envers ses fidèles, la prise en compte de leurs prières et la réalisation de leurs voeux.
Ce simple attribut l’épithète pa-néfer-her, personnifiant cette qualité d’écoute se transforma peu à peu en divinité propre. A l’époque tardive on forgea ainsi des entités entièrement consacrées à l’écoute des fidèles. On peut cité ainsi Mestanymis, dont le nom dérive de l’épithète très répandus au Nouvel Empire, Les oreilles qui écoutent, et bien sur Pnéphéros, vénéré entre autre à Karanis ou à Théadelphie.