Voici comment le père de l’histoire relate le déroulement du deuil : « Toutes les femmes de la maison se couvrent de boue le tête ou même le visage. Puis elles laissent le cadavre dans la maison et courent par la ville en se frappant la poitrine, le sein nu, la robe retroussée par une ceinture ; toutes leurs parentes se joignent à elles. Les hommes se frappent et se lamentent de leur côté, dans une tenue semblable. Cela fait, on emporte le corps pour le faire embaumer. ». Deux jours après, une cérémonie religieuse dirigée par le prêtre embaumeur marque le début des longues opérations d’embaumement.

Des techniques qui s’affinent
En empêchant la décomposition du corps, les Egyptiens croyaient permettre à l’âme du défunt de rejoindre le monde souterrain pour y commencer une nouvelle vie. Cette idée de conserver une apparence humaine au mort est certainement née de l’observation de cops naturellement momifiés par les sables secs du désert, il y a plus de 3000 ans. Les premiers témoignages connus remontent à la fin de la IIIe dynastie, 2600 ans avant J.C., mais c’est sous la XXIe dynastie, que les techniques de momification atteignent leur apogée. Au début, les cadavres étaient seulement enveloppés de bandelettes enduites de résine, mais à partir de la IVe dynastie, les viscères sont ôtés et enfermés dans des vases canopes posé près du défunt. Le progrès le plus important est la découverte des propriétés du natron (ou natrum), un carbonate sodium provenant du delta du Nil qui à la particularité de déshydraté naturellement les tissus. Les Anciens Egyptiens l’utilisaient par ailleurs comme dentifrice, antiseptique et détergent. Sous la XXIe dynastie, les maîtres embaumeurs améliorent la présentation du défunt en incisant la peau du visage afin d’y glisser de l’argile pour lui redonner du volume.

La « place pure »
Sous l’Ancien Empire, les opérations d’embaumement se déroulaient sous une simple tente disposé à proximité de la nécropole. Elle sera ensuite remplacé par une construction en brique, appelé ouabet, la « place pure » ou la « belle maison », élevé près du fleuve, ou a proximité de canaux à la périphérie des cités. La proximité de l’eau était essentielle à une bonne pratique. Le savoir des embaumeurs se transmettait sans doute d père en fils, ou en tout cas de maître à élève.
Hérodote nous conte la suite du deuil : « Les parents reprennent ensuite le corps et font faire un coffre en bois, taillé à l’image d’un homme, dans lequel ils le déposent ». Lorsque la momification se démocratisera, on aura recours à des méthodes d’embaumement plus basique : On se contentera d’injecter un huile destinée à dissoudre les organes internes en passant par l’anus, voir même d’un simple lavage à l’eau avant de plonger le corps dans le natron.

Description d’une momification sous le Nouvel Empire
La première chose que fait la famille lorsqu’elle amène le corps chez l’embaumeur est de discuter le tarif. Plus le travail est soigné et plus les prix grimpent. Elle apporte aussi les vases canopes ou seront conservés les intestins, le foie, les poumons et l’estomac.
L’aménagement le plus important de l’atelier est la table d’embaumement. Elle est en pierre sculptée en forme de lion allongé, d’ou son appellation de table « léontomorphe ». Elle est souvent inclinée et présente des rainures permettant l’écoulement de l’eau de lavage et des fluides corporels.
Retrait du cerveau
La première étape, et aussi l’une des plus délicates, consiste à extraire le cerveau de la boite crânienne. Cette opération est réalisée à l’aide d’un crochet métallique que l’on introduit par la narine [Ce qui explique le mauvais état généralement constaté de la paroi nasale de nombreuses momies]. La plupart de ces crochets sont en bronze et peuvent mesurer jusqu’à 40 cm de long. Ces tiges très fines sont recourbées à leurs extrémités pour mieux pénétrer dans les narines. Cependant certains embaumeurs avait recours à une autre technique : Il retiraient le cerveau par le trou occipital situé à la base du crâne.
Une fois la boite crânienne vidé, l’embaumeur remplissait la cavité d’un mélange de cire d’abeille, d’huiles végétales et de résine de conifère, voir parfois de bitume, le mélange étant préalablement chauffé pour accentuer sa fluidité. En refroidissant le mélange se solidifiait et formait une croûte protectrice.

Le corps était ensuite éviscéré. On utilisait pour cela une lame tranchante en pierre avec laquelle l’embaumeur pratiquait une incision le long de la paroi abdominale. Les organes internes, cœur, intestins, estomacs, etc.… étaient retirés par cette ouverture. Le cœur, organe majeur de la pensé et de la sagesse était remis en place après le nettoyage de la cavité abdominale ou remplacé par un scarabée en forme de cœur. Les viscères étaient nettoyés, traités au natron et enveloppé dans du lin très fin [La finesse du tissu dépendait de la classe sociale du défunt, les lins les plus subtils étant réservés au pharaon]. Chaque organes ainsi emmailloté dans un petit sachet, est ensuite placé dans un vase canope au nom du défunt [Ces vases étaient déposé dans un coffre chapelle pour les plus riche ou déposé à même le sol à proximité du sarcophage pour les plus modeste].
Préservation du corps
Les embaumeurs « salaient » alors le corps en le recouvrant de natron [Mélange de carbonate et de bicarbonate de soude disponible en grande quantité sur le site du « Ouadi-Natron »,la prairie du sel, à l’ouest du Fayoum.]. Ce salage était effectué avec des cristaux plutôt qu’en solution aqueuse. Le natron, ainsi répandu à l’extérieur et à l’intérieur du corps, possède des propriétés hygroscopiques qui lui permettent d’absorber l’humidité des tissus. Ce processus de dessiccation, empêchant la décomposition des tissus, duraient de quarante cinq à soixante et dix jours.

A l’issue de cette période, le corps est de nouveau lavé, puis oint de diverses huiles et produits d’embaumement. L’abdomen était nettoyé, purifié avec du vin de palme et des aromates broyés ainsi qu’une quinzaine d’autres produits destinés à conserver le corps et à éviter toutes putréfaction. Les narines, les yeux, la bouche et la plaie due à l’incision étaient colmatés avec un mélange de cire d’abeille, de cinnamome, d’oignon, de vin de palme, de sciure de bois, d’huile de cèdre, de gomme, de henné, de lin, de poix ou de goudron. La plupart de ces ingrédients très précieux venaient de l’étranger comme la poix et le goudron, extrait du cèdre du Liban.
La touche finale
Le corps était ensuite méticuleusement enveloppé, membres après membres. Les embaumeurs utilisaient des bandelettes de lin ou de drap imprégné de gomme. Les doigts particulièrement fragiles, étaient enfermés dans des doigtiers prévus à cet effet. De nombreux bijoux, talismans et autres scarabées étaient placés entre les couches de bandelettes pour protéger la momie des dangers maléfiques. Toutes ces opérations étaient rythmées par des récitations psalmodiques de formules magiques et religieuses. La momie était enfin prête à être rendue à la famille.
