Les dernières pyramides
Article mis en ligne le 26 mars 2021

En plus des deux pyramides de la XIIIe dynastie , une seule autre, au massif de brique crue presque rasé (de 100 coudées de côté), située à environ un kilomètre au sud de celle d’Amenemhat III à Dahchour, est attribuable à l’un des nombreux rois de la IIe Période intermédiaire ; portant le nom d’Ameny ‘Aamou (l’Asiatique), ce roi serait peut-être l’un de ces Hyksos (XVe-XVIe dynasties) qui dominèrent le nord du pays, tandis que, à Thèbes, les souverains de la XVIIe dynastie contrôlaient toujours la Haute-Égypte. Ahmosis, le dernier de ceux-ci, qui, après avoir réunifié l’Égypte vers 1580 avant J.-C., devint le fondateur de la XVIIIe dynastie, édifia à Abydos un cénotaphe en forme de pyramide, mais sa tombe même n’a pas été retrouvée. Son fils, Aménophis Ier, édifia la sienne dans la nécropole thébaine à Dra Aboul-Naga ; ce complexe funéraire, très ruiné et probablement assez analogue à ceux des rois Antef, pourrait avoir comporté comme eux une petite pyramide à base étroite et pente accusée. Après ces deux rois, Thoutmosis Ier (1530-1520 av. J.-C.) décida de creuser sa tombe dans la falaise du cirque où prend naissance ce qui allait devenir la célèbre Vallée des rois, lieu dominé par une cime culminante, précisément en forme de pyramide. Tous les rois du Nouvel Empire viendront dès lors creuser leurs hypogées à la base des flancs de cette pyramide naturelle, se contentant d’édifier dans la plaine de Thèbes leurs temples de culte funéraire.

Pourtant, si la pyramide construite disparaît ainsi de l’architecture funéraire royale, elle s’implante au contraire comme symbole de protection solaire dans les tombes privées. Dès le Moyen Empire, à Abydos, des caveaux voûtés en encorbellement avaient été aménagés à l’intérieur de petites pyramides de brique crue. Mais ce sera surtout à partir du Nouvel Empire, et jusqu’à l’époque romaine, que les tombes en forme de maisons souvent à portiques comporteront sur leur terrasse une pyramide en brique crue à forte pente, couronnée par un pyramidion de pierre gravé, représentant parfois le propriétaire adorant le dieu-Soleil. Les meilleurs exemples de ces tombes ont été découverts à Deir el-Medineh, dans la nécropole thébaine .

D’autre part, quelque huit siècles après la construction de la dernière pyramide royale à Thèbes, la conquête de l’Égypte entreprise par les souverains de Napata, au Soudan, fut réalisée par l’un deux, Piankhy, le fondateur de la XXVe dynastie (715 av. J.-C.). Ce dernier revint alors à la forme pyramidale pour sa tombe, qu’il édifia en pierre, à El-Kurrut, nécropole de ses prédécesseurs près de Napata. Cette pyramide, aujourd’hui démantelée, n’aurait mesuré qu’une douzaine de mètres de côté, mais aurait présenté une forte pente, d’environ 68° ; elle surmontait un caveau creusé dans le sol et voûté en encorbellement, auquel conduisait un escalier venant de l’est. Les successeurs de Piankhy construisirent là des pyramides analogues, mais avec caveau souterrain ; puis Taharqa, dernier Koushite ayant régné sur l’Égypte (690-667 av. J.-C.), édifia sa pyramide, la plus grande de Nubie (45 m environ) à Nuri, à 30 kilomètres en amont. Durant deux siècles, les rois de Koush y dressèrent encore les leurs, plus modestes, malgré le transfert de la capitale, après la défaite d’Aspalta en 591, plus au sud, à Méroë où près d’une cinquantaine de pyramides royales furent édifiées jusqu’à l’anéantissement du royaume de Méroë par les Axoumites vers 350 après J.-C. Par ailleurs, dans diverses nécropoles de cette période méroïtique (comme à Sedeinga), des pyramides en briques crues surmonteront souvent des tombes de notables.

Quant aux pyramides d’Amérique centrale ou du Mexique, ainsi appelées par analogie, elles ont été érigées au cours des civilisations maya et aztèque du IVe au XVIe siècle de notre ère. Il s’agit d’édifices en gradins ou, parfois, en forme de tronc de pyramide, le plus souvent sur plans carrés ou légèrement oblongs, comportant un ou plusieurs grands escaliers droits plaqués en façade, qui conduisaient au sanctuaire disposé au sommet. Elles furent donc essentiellement les énormes soubassements de temples surélevés ; elles présentent dans leur conception beaucoup plus de points communs avec les ziggourats d’Orient qu’avec les pyramides d’Égypte, qui étaient, au contraire, les gigantesques superstructures de tombes royales que l’on n’avait plus à gravir.