La monnaie
Article mis en ligne le 16 août 2024
dernière modification le 12 juillet 2024

Les Anciens Egyptiens ignorèrent l’usage de l’argent jusqu’à la XXXe dynastie et l’époque grecque. Avant cette période tardive, ils utilisaient le troc, aussi bien pour les échanges de marchandises sur les marchés que pour les transactions internationales.

Tétradrachme d’Antioche

Du simple paysan au vizir, tous les Egyptiens font du troc. Des statuettes contre du pain, du tissus contre des sandales, des boisseaux d’orge ou de blé contre du bétail. Le marchandage n’avait sans doute rien à envier à ceux du souk du Caire d’aujourd’hui.

Les murs d’une sépulture d’un fonctionnaire de la Ve dynastie retrouvée à Saqqarah présentent ainsi une scène de marché datant de l’Ancien Empire. On peut y voir des commerçants, assis devant leur échoppe, proposant leurs produits : du poisson, des abats, des tissus, des fruits et des légumes. Tout les acheteurs sont du sexe masculin et portent de petits sacs en bandoulière destinaient à transporter leurs achats et les biens qu’ils souhaitent échanger contre les produits du marché. Un acheteur tente là d’échanger un éventail contre une coupe. « Voici quelque chose dans quoi tu pourras boire » lui dit la vendeuse. Ailleurs on tente de troquer une cruche contre un poisson. Plus loin un marchand de légume s’adresse à une client : « Donne-moi ce que tu as apporté et je te donnerai de beaux légumes. » Tout cela se passe apparemment sans heurt, et chacun a l’air de réussir à conclure sa transaction sans difficulté.

A l’écart, une scène apparaît différente : Un vendeur déroule une longue pièce de tissu devant un acheteur. Ils concluent l’affaire. Le client déclare : « ceci est un drap de dieu, du beau travail ». Le commerçant lui répond : « Tant de coudées de drap en échange de six shats. »

L’huile, le grain ou le tissu en guise de monnaie ?

Le shat n’est pas une monnaie, mais une unité abstraite qui permettait de déterminer la valeur des denrées et des produits manufacturés. Notre acheteur, connaissant la valeur marchande de son drap, pourra l’échanger contre d’autre objets dans un rapport d’équivalence.

Les Egyptiens qui reçoivent des salaires, les artisans, les paysans ou les ouvriers, étaient rémunérés en nature : tissus, sandales, huile, grains ? De quoi subvenir à leurs besoins essentiels. Ils utilisaient le surplus sur les marchés pour l’échanger contre d’autres biens : vêtements, bijoux, viandes, poissons ?

Sous l’Ancien Empire, la valeur refuge est l’or. Le shat aurait ainsi correspondu à 7,5 grammes du précieux métal. Son multiple, le deben, valait 12 shats, soit 90 grammes d’or. Si l’on se reporte à un acte de vente d’une maison situé à proximité de la pyramide de Kheops, on apprend que sa valeur avait été estimé à dix shats d’or. Elle a changé de propriétaire en échange de six shats de tissus et d’un lit d’une valeur de quatre shats.

Aux dire des spécialistes, le shat serait tombé en désuétude au Nouvel Empire. On se servait plutôt du deben à cette époque. On vit même apparaître sous la XIXe dynastie le quite qui correspondait à un dixième du deben. Les Egyptiens comptaient ainsi en deben d’or, d’argent ou de cuivre. Bizarrement au Nouvel Empire, l’argent détrône l’or dans son rôle de valeur étalon, sans que l’on puisse clairement expliquer pourquoi. Ainsi on relevé les prix suivants : un récipient en bronze valait vingt deben de cuivre, soit deux quites d’argent. Un b ?uf coûtait entre trente et cinquante debens de cuivre. Un manteau s’échangeait contre quatre quites d’argent. Une couverture de lin valait cinq quites d’argent.

Des boeufs contre des lentilles !

Les échanges entre états étaient régis par les mêmes principes. L’Egypte échangeait ainsi ses propres marchandises contre du bois de cèdre à Byblos au Liban.

On a retrouvé les archives d’un certain Ounamon qui avait échangé des pièces de bois contre des cruches en or et en argent, des pièces de lin royal, des rouleaux de papyrus, cinq cent vingt sacs de lentilles, trente couffins de poisson séché, cinq cent peaux de b ?uf. On a supposé que les deux parties avaient effectué les conversions en or et argent avant de se mettre d’accord sur la valeur en marchandises.

On suppose que les mesures de poids, de longueur et de capacité sont disponibles dans les bureaux du gouvernement ou dans les temples. De plus les mesures étaient régulièrement calibrées et contrôlées par les scribes royaux. Ainsi le deben se présente sous la forme d’un fil de métal replié que l’on coupe pour lui donner le poids convenu. On a retrouvé dans certaines tombes de la XVIIIe dynastie des pièces en or, en argent et en cuivre, mais elles ne portaient aucune indication de valeur attestant l’existence d’une monnaie véritable.

Les premières pièces de monnaie furent frappé par les pharaons de la XXXe dynastie, sans doute sous l’influence du monde grec. Les pièces d’or faisant partie des butins de guerre sont conservées comme trésor et souvent fondus sous forme de lingots.

Les monnaies étrangères

Tétradrachme de Ptolémée Ier

Les étrangers voulant commercer en Egypte étaient obligés d’échanger leur pièces de monnaie sur la base de leur valeur intrinsèque d’or d’argent ou de cuivre et non par rapport à leur valeur faciale. Les archéologues ont ainsi retrouvé des déchets de cuivre ou d’argent destinés à être fondus et transformés en objets. Les commerçants étrangers résidant dans le pays devaient eux aussi se plier aux lois égyptiennes et pratiquer le troc.