La IIIe dynastie de l’Ancien Empire d’Égypte est une dynastie relativement courte et obscure de l’histoire égyptienne, faisant la transition entre la période thinite et l’Ancien empire entre environ 2750 et 2675 AEC (certains chercheurs, dont Toby A. H. Wilkinson, considérent cette dynastie comme la fin de la première période dynastique ; même si la majorité des chercheurs, dont Aidan Mark Dodson, la place au début de l’Ancien Empire). La durée de la dynastie est incertaine, allant de 49 ans à 138 ans selon les chercheurs, tandis que le nombre de rois la composant est aussi l’objet de débats. Les figures emblématiques sont le roi Djéser et Imhotep, respectivement le commanditaire et l’architecte de la première pyramide d’Égypte : La pyramide à dégrés de Saqqara.
Pharaons de la IIIe Dynastie :
– Horus Nebka
– Djéser
– Horus Sékhemkhet
– Khaba
– Néferkarê
– Houni.
Sources
Sources contemporaines

Les sources contemporaines sont relativement peu nombreuses et donnent plusieurs noms de rois. Si, pour les périodes ultérieures, la titulature royale égyptienne est codifiée et est composée de cinq noms, cela n’est pas encore le cas pour la IIIe dynastie : si le nom d’Horus (principal nom à cette période) est clair, un deuxième nom existe, accompagné du titre Nebty et, parfois mais pas systématiquement, du titre Nesout-bity (titre qui, aux périodes ultérieures, introduira le nom principal du roi dans un cartouche) ; le cartouche fait également son apparition (les usages attribués à la IIe dynastie semblent être des contrefaçons ou des artefacts postérieurs mal datés) à cette période, mais son usage et sa rareté font débats ; enfin, le nom d’Horus d’or avait déjà fait son apparition pendant la Période thinite, mais son usage rare ne le rend pas déterminant quant à l’analyse du nombre de rois et de leur ordre de succession. De plus, ces noms ne sont pas toujours clairement liés les uns aux autres. Enfin, certains artefacts font l’objet de débats, que ce soit pour leur datation ou, particulièrement quand ils sont à l’état fragmentaire, pour leur interprétation. Le seul roi dont la titulature est connue entièrement est Djéser.
Différentes attestations des rois ont été découvertes :
- Netjerikhet (plus connu sous le nom de Djéser/Djoser, bien que ce nom soit postérieur)
- nom d’Horus : Netjerikhet (de multiples attestations dont des empreintes de sceaux dans la tombe de Khâsekhemouy, montrant qu’il a (ré- ?)enterré le roi, une empeinte de sceau dans la tombe K1 de Beit Khallaf trouvée avec une empreinte de sceau de Khâsekhemouy, ainsi que des empreintes de sceaux dans la tombe K2 de Beit Khallaf avec celles de Sanakht),
- nom de Nebty : (Nesout-bity)-Netjerikhet-Nebty (attesté sur la statue du serdab du complexe funéraire de Djéser et dans les inscriptions des galeries souterraines sous la pyramide et le tombeau sud),
- nom d’Horus d’Or : Nebou-Rê/Nebou (attesté sur la statue du serdab du complexe funéraire de Djéser et dans les inscriptions des galeries souterraines sous la pyramide et le tombeau sud),
- Sekhemkhet :
- nom d’Horus : Sekhemkhet (de multiples attestations dont des vases et des empreintes de sceaux dans la galerie menant aux appartenant funéraires du complexe funéraire conventionnellement attribué à Sékhemkhet)8,
- nom de Nebty : Hetep-Ren-Nebty (l’unique attestation est une empreinte de sceau trouvée à Éléphantine)8,
- Sanakht :
- nom d’Horus : Sanakht (de multiples attestations dont des empreintes de sceaux trouvées dans une salle du coin nord-est du temple funéraire du complexe funéraire de Djéser et dans la tombe K2 de Beit Khallaf9),
- cartouche : -ka ? (l’unique attestation est une empreinte de sceau, numérotée E 5251, trouvée dans le mastaba K2 de Beit Khallaf avec le nom d’Horus Sanakht)),
- Khaba :
- nom d’Horus : Khaba (de multiples attestations dont huit bols inscrits et trouvés dans le mastaba Z500 situé à deux-cents mètres au nord de la Pyramide à tranches à Zaouiet el-Aryan),
- nom d’Horus d’or : Netjer-Nebou (l’unique attestation est une empreinte de sceau, numérotée UC-11755, montrant le nom d’Horus et le nom d’Horus d’or),
- Djeseret-Ânkh-Nebty
- nom de Nebty : Djeseret-Ânkh-Nebty (l’unique attestation est une étiquette d’ivoire appartenant au mobilier funéraire du commanditaire du complexe funéraire conventionnellement attribué à Sékhemkhet)8 ; un document un peu postérieur à la dynastie semble citer ce nom sous la forme Téti : dans la tombe G1011 de Mesdjérou à Gizeh datée de la Ve dynastie, une liste de six rois est inscrite quatre fois et présente dans l’ordre Bedjataou (identifié dans les listes royales ramessides à Hotepsekhemouy, premier roi de la IIe dynastie), Téti, Djédefrê, Khâfrê, Sahourê et Néferirkarê,
- Nebka :
- nom en cartouche : Nebka (l’unique attestation contemporaine est l’un des titres du haut-fonctionnaire Akhetaâ, ayant exercé vers la fin de la IIIe dynastie : prêtre du roi Nebka ; mais ce titre est sujet à débat : Akhetaâ était-il un prêtre servant le culte du roi régnant ou celui d’un roi déjà décédé ?), deux documents un peu postérieurs à la dynastie cite ce nom : un nom de domaine royal formé avec celui de Nebka est listé dans le complexe funéraire du roi Niouserrê (Ve dynastie) et un fonctionnaire de la Ve dynastie, enterré dans un mastaba en contrebas de la chaussée du complexe funéaire d’Ounas, c’est-à-dire juste au sud du complexe funéraire de Djéser, portait le nom basilophore Nyânkh-Nebka,
- Qahedjet :
- nom d’Horus : Qahedjet (l’unique attestation est une stèle de provenance incertaine (Dahchour selon le vendeur) et achetée par le Musée du Louvre en 1967 (numéro E 25982), mais son attibution à la IIIe dynastie n’est pas certaine, le document daterait en fait plutôt du règne de Snéfrou selon des découvertes ayant eu lieu au cours des années 2020 au Ouadi el-Jarf ou de Thoutmôsis III qui, parmi ses divers noms d’Horus, avait bien celui de Qahedjet accompagné de l’épithète Méry-Rê comme le montrent plusieurs obélisques),
- Houni (la graphie contemporaine est de lecture incertaine mais pourrait être lu Nesout-Hou ; la graphie ultérieure est différente et se lit Houni) :
- nom de Nebty : Nesout-Hou, précédé du titre Nesout-bity écrit sur un bol découvert dans un mastaba à Abousir18,
- nom en cartouche : Nesout-Hou, attesté sur un cône de granit d’Éléphantine (JE 41556) associé à la pyramide provinciale d’Éléphantine, pierre de Palerme), ainsi que dans un nom de domaine du 2e nome de Basse-Égypte sur une inscription dans la tombe du haut-fonctionnaire Metjen.
Sources postérieures à l’Ancien Empire
Papyrus Westcar
Le papyrus Westcar, papyrus littéraire datant de la fin de la Deuxième Période intermédiaire mais dont le texte initial date du Moyen Empire au plus tôt, nomme quatre rois successifs : Djéser, Nebka, Snéfrou et Khoufou. Cet ordre de succession Djéser-Nebka a fait partie de l’argumentaire de certains chercheurs, cet ordre étant contradictoire avec les sources du Nouvel Empire.
Papyrus Prisse
Le papyrus Prisse, papyrus littéraire datant de la fin de la Deuxième Période intermédiaire mais dont le texte initial date du Moyen Empire au plus tôt, est composé de deux traités dont l’un se nomme les Préceptes de Kagemni, parlant du vizir Kagemni ayant exercé successivement sous Houni et Snéfrou.
Tombe de Mahou
Un relief de la tombe de Mahou, dépositaire du Trésor du début de la XIXe dynastie, représente successivement les rois Djésernoub (probablement Djéser), Téti, Ouserkaf et a minima un autre roi dont seules les traces d’un cartouche demeurent. L’identification de ce Téti à Djeseret-Ânkh-Nebty est probable par la comparaison avec les listes royales ramessides5.
Listes royales ramessides
Trois listes ramessides citent les rois de la IIIe dynastie. Ces listes datent de plus d’un millénaire après les règnes de ces rois et plusieurs erreurs s’y sont glissées, sans compter qu’elles ne sont pas parfaitement concordantes les unes avec les autres.
Liste d’Abydos | Table de Saqqarah | Canon royal de Turin (durée de règne) |
---|---|---|
Nebka | - | Nebka (19ans) |
Djésersa | Djéser | Djéserit (19 ans) |
Téti | Djésertéti | Djéserty (6 ans) |
Sedjes | - | Houdjéfa (6 ans) |
Néferkarê | Nebkarê | - |
- | Houni | Houni (24 ans) |
On remarque que le nom Nebka est placé en premier, contrairement au papyrus Westcar, ce qui n’est pas sa place certaine (voir ci-dessous). Si le nom de Djéser est facilement reconnaissable, les noms Néferkarê et Nebkarê ne renvoient à aucun nom connu de la IIIe dynastie (peut-être un nom en cartouche inconnu d’un des rois de la période ressemble à Néferkarê), tandis que les noms Sedjes et Houdjéfa expriment en réalité le fait que le nom écrit sur la source ayant servi à élaborer ces listes est illisible. Enfin, les noms Djéserti et Djésertéti (Téti pouvant en être un diminutif) rappellent le nom de Nebty Djeseret-Ânkh7, qui fut longtemps attribué à Sekhemkhet, mais ceci doit être révisé Une chose est à noter, c’est que le nombre de rois listés est de cinq ou de quatre, ce qui est concordant avec les sources contemporaines et les interprétations et propositions des chercheurs
Statuette du prêtre Iâhmes
Une statuette de la XXVIe dynastie représentant un certain Iâhmes (ou Ahmosé), qui est « prophète du roi du double-pays Netjerikhet-Djéser » et « prêtre de Djésertéti », associant à nouveau Djéser et Djésertéti/Téti, c’est-à-dire Djeseret-Ânkh-Nebty ; cette statuette se trouve aujourd’hui à Berlin et est numérotée ÄM1476528.
Stèle de la famine
Le nom de Djéser est attesté par de nombreux documents autres que ceux cités précédemment, dont une statue de Sésostris II qui est la plus ancienne attestation de ce nom et des graffiti datant du règne d’Amenhotep Ier jusqu’à la XXVIe dynastie et situés dans le complexe funéraire de Djéser. Cependant, la stèle de la famine de l’île de Sehel, datée du règne de Ptolémée V et réalisée de telle sorte que l’inscription fait croire qu’elle date de Djéser : la titulature contemporaine du roi y est en effet présente, mais la présence du nom Djéser trahit sans l’ombre d’un doute la date postérieure de l’inscription ; cette stèle permet l’identification absolument certaine de l’Horus Netjerikhet avec le roi Djéser des sources postérieures.
Manéthon
Manéthon, écrivant au IIIe siècle av. J.-C., mentionne neuf autres rois (avec la durée de règne) : Necheróphes (28 ans), Tosorthrós (29 ans), Týreis (7 ans), Mesôchris (17 ans), Sôÿphis (16 ans), Tósertasis (19 ans), Achês (42 ans), Sêphuris (30 ans) et Kerpherês (26 ans)33,5. L’association d’un nom grec avec un nom contemporain ou ramesside n’est pas chose aisée, sans compter qu’un tel nombre de neuf rois est très peu probable, malgré tout, certains égyptologues ont fait quelques propositions : Necheróphes est souvent associé au nom Nebka, Tosorthrós à celui de Djéser, Týreis à celui de Téti, Sôÿphis au pseudonyme Sedjes et Achês à celui d’Houni.
Analyse
Fondateur de la dynastie
Si Djéser est incontestablement à situer au début de la dynastie, sa place en tant que fondateur n’est pas certaine : les avis divergent suivant l’interprétation des éléments présentés ci-dessus, notamment concernant l’Horus Sanakht et le roi Nebka. Djéser est généralement vu comme le fils et successeur de Khâsekhemouy, ayant procédé à l’enterrement de ce dernier comme l’attestent les empreintes de sceaux dans la tombe de ce dernier. De plus, alors que la plupart des rois des Ire et IIe dynasties, y compris des rois obscurs et inconnus par ailleurs, se trouvent dans les artefacts inscrits dans la tombe de Djéser à Saqqarah, le seul roi de la IIIe dynastie, hormis Djéser lui-même, cité dans le complexe funéraire du souverain est Sanakht, sur des empreintes de sceaux trouvées dans une salle du coin nord-est du temple funéraire dans le cadre de la fourniture du culte du souverain. Ainsi, pour ces différentes raisons, Djéser est vu comme le fondateur de la dynastie par la majorité des chercheurs.
Cependant, la position alternative mettant Djéser en tant que deuxième roi de la IIIe dynastie est aussi défendue, notamment par Ilaria Incordino. Non seulement les empreintes de sceaux de Djéser dans la tombe de Khâsekhemouy ne sont pas une preuve d’une succession directe car il aurait pu réaliser un réenterrement, comme ce qui a pu se produire au passage de la Ire à la IIe dynastie où des empreintes de sceaux d’Hotepsekhemouy, premier roi de la IIe dynastie, ont été retrouvées dans la tombe du roi Qâ, malgré le fait qu’il semble que deux rois éphémères (Horus Oiseau et Sneferka) aient régné entre eux8. L’étude d’Ilaria Incordino, basée sur divers éléments iconographiques, architecturaux et textuels, semble montrer que Sanakht est à situer au début de la IIIe dynastie, et, admettant une succession directe Djéser-Sékhemkhet, l’autrice place Sanakht comme fondateur de la dynastie. Andrzej Cwiek réfute toutefois la validité de cette étude, arguant que deux stèles de Snéfrou (premier roi de la IVe dynastie) du Ouadi Maghara sont très différentes dans leur style et leur exécution malgré le fait qu’elles datent du même règne, limitant ainsi très fortement la portée de l’étude d’Ilaria Incordino.
Horus Sanakht, roi Nebka et Horus Sekhemkhet
Comme abordé précédemment, la place de Sanakht fait encore l’objet de débats. Il ne s’agit toutefois pas du seul débat concernant ce roi : en effet, même en admettant une position chronologique postérieure à celle de Djéser, il reste à déterminer sa place chronologique par rapport à Sekhemkhet ; il reste également à déterminer le lien entre l’Horus Sanakht et le roi Nebka ; enfin, l’attribution du complexe funéraire conventionnellement attribué à Sekhemkhet a fait l’objet d’une revue suite à la découverte et à la publication dans les années 2000 d’un sceau associant l’Horus Sekhemkhet à son nom de Nebty Hetep-Ren-Nebty ; et ces débats s’alimentent les uns les autres.
Concernant le premier débat, une étude a démontré que les restes de cartouche présents sur l’empreinte de sceau E 5251 du mastaba K2 de Beit Khallaf, inscrit également au nom de Sanakht, étaient celui de Nebka. Sur cette base, faisant remarquer l’absence d’utilisation de cartouche au début de la dynastie et s’appuyant sur le fait que Sekhemkhet était le commanditaire de la pyramide de Saqqarah qui lui est conventionnellement attribuée qui est stylistiquement très proche de celle de Djéser, certains chercheurs ont donc placé Sanakht après Sekhemkhet. À ceci, il a été ajouté que la vaisselle de pierre inscrite, caractéristique de la Période thinite et des règnes de Khaba et Snéfrou, mais pas des règnes de Djéser et Sekhemkhet, rapproche d’autant ce dernier de Djéser (et Khaba de Snéfrou). A contrario, il a également été remarqué que les empreintes de sceaux de Sanakht ont été retrouvées dans le temple funéraire de Djéser mais aussi dans la tombe K2 de Beit Khallaf en compagnie d’empreintes de sceaux de Djéser, contrairement à Sekhemkhet, complètement absent du tombeau de Djéser et du tombeau K2. Enfin, il peut être souligné que, si les deux pyramides de Saqqarah sont chronologiquement très proches, un règne court intermédiaire n’est en rien inenvisageable. Si ces éléments ne donnent pas d’arguments décisifs, Toby Wilkinson et Michel Baud ont tous les deux eu tendance à placer Sanakht après Sekhemkhet et Khaba.
Toutefois, à la suite de la publication d’une empreinte de sceau provenant d’Éléphantine associant Sekhemkhet et son nom de Nebty jusque-là inédit, Hétep-Ren-Nebty, Jean Pierre Pätznick a émis une nouvelle hypothèse concernant le commanditaire de la pyramide de Saqqarah qui est conventionnellement attribuée à Sekhemkhet. En effet, deux noms ont été découverts en deux contextes différents dans cette pyramide : le nom de Nebty Djeseret-Ânkh-Nebty attesté sur une étiquette d’ivoire appartenant au mobilier funéraire du commanditaire du complexe funéraire, et le nom d’Horus Sekhemkhet sur des empreintes de sceaux trouvées dans les couloirs menant aux appartements funéraires et pouvant provenir tout autant du propriétaire de la tombe que de celui qui l’a enterré. Le sceau d’Éléphantine et l’étiquette d’ivoire permettent, ensemble, à Jean-Pierre Pätznick d’éliminer la première hypothèse et donc de choisir la seconde : Sekhemkhet n’aurait fait que fournir le mobilier funéraire de son prédécesseur Djeseret-Ânkh-Nebty. Reprenant alors les différents éléments cités au paragraphe précédent, Jean-Pierre Pätznick résout l’incohérence et place Sanakht en tant que successeur de Djéser, prédécesseur de Sekhemkhet et commanditaire de la pyramide de Saqqarah conventionnellement attribuée à Sekhemkhet.
Aidan Dodson, quant à lui, s’il avait initialement placé Sanakht avant Sekhemkhet dans son ouvrage « The Royal Tombs of Ancient Egypt » dont la première édition date de 2016, il a révisé sa chronologie en plaçant Sanakht après Sekhemkhet dans son ouvrage « The Royal Tombs of Ancient Egypt » publié en 2021. Il n’a cependant pas suivi Jean-Pierre Pätznick quant à la réattribution de la pyramide conventionnellement attribuée à Sekhemkhet. Au contraire, il attribue à Sanakht un monument construit en brique à Abou Rawash et nommé El-Deir. Quant à Andrzej Cwiek, s’il considère la publication du sceau d’Éléphantine comme importante pour la compréhension de la chronologie de la période, il réfute complètement la réattribution de la pyramide de Saqqarah à Sanakht, jugeant la proposition complètement spéculative5.
Enfin, l’association du nom Nebka à l’Horus Sanakht ne fait pas l’unanimité. Par exemple, Nabil Swelim, réfutant la reconstitution de l’empreinte de sceau fragmentaire E 5251 trouvée dans le mastaba K2 de Beit Khallaf, identifie Nebka avec l’Horus Khaba45. Plus récemment, Jean Pierre Pätznick a émis l’hypothèse suivante : si Nebka est bien le nom en cartouche inscrit sur l’empreinte de sceau E 5251, son identification à l’Horus Sanakht n’est pas certaine. Au travers de plusieurs éléments (lecture du sceau renvoyant les mentions de Sanakht et de Nebka à deux personnes différentes ; titres d’Akhetaâ, entre autres prêtre de Nebka, très similaires à ceux inscrits dans le complexe funéraire de Djéser ; roi Nebka très vénéré à l’Ancien Empire, etc.), il identifie Nebka à l’Horus Netjerikhet.
Roi Houni et Horus Qahedjet
La place d’Houni en tant que dernier roi de la dynastie est certaine : en effet, les sources postérieures, quand elles citent Houni, le placent systématiquement en tant que dernier roi de la dynastie et prédécesseur direct de Snéfrou ; quant aux sources contemporaines, que ce soit l’utilisation du cartouche, la carrière du haut fonctionnaire Metjen ou encore la construction a minima de la pyramide provinciale d’Éléphantine, mise en parallèle de la construction de la pyramide provinciale de Seilah par Snéfrou (les autres pyramides provinciales ayant probablement été construites sous le règne de l’un de ces deux rois), rapprochent le règne d’Houni de celui de Snéfrou, confirmant ainsi les sources postérieures.
Le principal problème concernant Houni est que son nom d’Horus est inconnu. Pendant longtemps, le nom de d’Horus Qahedjet, attesté uniquement par une stèle de provenance incertaine (Dahchour selon le vendeur) et aujourd’hui au Louvre (numéro E 25982) datée de la IIIe dynastie sur la base d’une étude stylistique, avait donc été placé dans cette dynastie et associé, par défaut, au roi Houni15. Cependant, cette attibution à la IIIe dynastie n’est pas certaine, la stèle présenterait en effet beaucoup d’innovations stylistiques dans la représentation du roi et du dieu, innovations dont la plupart ne réapparaîtront qu’au Moyen Empire ou au début du Nouvel Empire, ce qui ferait dater le document plutôt du règne de Thoutmôsis III qui, parmi ses divers noms d’Horus, avait bien celui de Qahedjet, le plus souvent accompagné de l’épithète Méry-Rê comme le montrent plusieurs obélisques. Pierre Tallet reconnait que l’attribution de la stèle de Qahedjet à Houni, seul roi sans nom d’Horus de la IIIe dynastie dans le cadre de la théorie d’une dynastie à cinq rois, est facile, surtout depuis les découvertes faites à Éléphantine où tous les rois sont présents et bien représentés par leurs noms d’Horus sur des empreintes de sceaux sauf Houni, qui est, quant à lui, pourtant bien attesté sous ce nom en cartouche sur le cône de granit (JE 41556). Toutefois, il n’est pas d’accord quant à l’attribution de la stèle à Thoutmôsis III. Les attestations du nom d’Horus Qahedjet pour ce roi sur des obélisques sont si ponctuelles et si particulières qu’elles cadrent mal avec cette identification. La découverte dans les années 2020 d’ancres de bateaux à Ouadi el-Jarf, datées du règne de Khoufou et portant le titre Qahedjet, sont en tout cas la preuve que ce titre était déjà utilisé dès la IVe dynastie. De plus, dans la section de la Pierre de Palerme portant sur le règne de Snéfrou, ce dernier est associé au titre Qahedjet. Ainsi, de par la provenance supposée de la stèle et ces différents éléments, Pierre Tallet suppose que la stèle venait de l’un des monuments funéraires de Snéfrou et le représentait donc ce roi, et il explique que si la stèle portait un nom d’Horus différent de celui de Snéfrou habituellement inscrit, Nebmaât, c’est parce que la stèle était située dans un monument tout entier dédié à ce roi et qu’il n’y avait donc aucun doute possible quant au roi représenté.
Jen-Pierre Pätznick, relevant que les sources contemporaines ne donnent que quatre noms d’Horus et que l’Horus Khaba était celui se rapprochant le plus de la fin de cette dynastie, a proposé de faire de ce roi le dernier de la IIIe dynastie, ce qui ferait de Khaba et Houni un seul et même roi. Rainer Stadelmann a également proposé la même chose, remarquant qu’il est étonnant qu’aucun monument en pierre d’envergure n’ait été trouvé comme dernière demeure pour ce roi, alors qu’il est crédité de vingt-quatre ans de règne selon le Canon royal de Turin (même si les durées de règne de ce papyrus doivent être prises avec précaution48), et associe donc à Khaba-Houni et la pyramide à tranches. Toutefois, cet avis n’est pas partagé par tous les chercheurs, comme par exemple Dodson qui continue de considérer cinq rois et différencie l’Horus Khaba du roi Houni.
Conclusion
Même si l’ordre des règnes et le nombre de rois ne sont pas assurés, il ressort qu’ils furent quatre comme le pense Pätznick ou cinq comme le pense traditionnellement le monde égyptologique, dont Michel Baud, Toby Wilkinson ou encore Aidan Dodson. La séquence suivante est toutefois retenue par les chronologies proposées par les égyptologues : Djéser → Sekhemkhet → Khaba →/= « Houni », seule la position de Sanakht étant la plus discutée. De nouveaux éléments doivent être apportés pour pouvoir clarifier la situation.
Le tableau ci-dessous présente les chronologies de quelques chercheurs :
Ilaria Incordino (2008) | Toby Wilkinson (1999) et Michel Baud (2002) | Aidan Dodson (2021) | Andrzej Cwiek (2008) | Jean-Pierre Pätznick (2008/2020) |
Sanakht = Nebka | ||||
Netjerikhet = Djéser | Netjerikhet = Djéser | Netjerikhet = Djéser | Netjerikhet = Djéser | Netjerikhet = Djéser = Nebka |
Sanakht | ||||
Sekhemkhet | Sekhemkhet | Sekhemkhet | Sekhemkhet | Sekhemkhet |
Sanakht = Nebka | ||||
Khaba | Khaba | Khaba | Khaba | Khaba = Houni |
Sanakht = Nebka | ||||
Qahedjet | ||||
Houni | Houni (= Qahedjet ?) | Houni (= Qahedjet ?) | Houni (= Qahedjet ?) |