L’ophtalmologie au temps des pharaons
Article mis en ligne le 17 novembre 2004
dernière modification le 4 novembre 2004

La réputation des médecins égyptiens s’étendaient bien au delà des frontières de leur pays. Homère lui-même les cite dans son "Odyssée". Hérodote classe pour sa part la population égyptienne comme étant la mieux portantes qu’il ait jamais rencontré.

Les Egyptiens furent aussi les premiers à diviser la médecine en différentes spécialités. L’ardeur du soleil égyptien donna naissance à une science ophtalmologique réputée.

En effet l’intense réverbération du soleil et la poussière soulevée par les vents du déserts étaient à l’origine de graves maladies. De nombreux praticiens se spécialisèrent alors dans les affections liés aux yeux et à la vue. Ces ophtalmologistes jouissent d’une réputation telle que des rois étrangers - tel Cyrus, souverain de Perse - font appel à eux. Une partie de ces médecins occupent un rang élevé dans la hiérarchie ecclésiastique égyptienne.

Il n’existe pourtant pas à proprement parler d’écoles de médecine, et les spécialités médicales se transmettent de père en fils. Toutefois, certaines "maisons de vie" - les écoles de l’Egypte ancienne - dispensent des cours de médecine, délivrés par des spécialistes et complétés par la fréquentation des scribes occupés à recopier les papyrus médicaux. Les deux écoles les plus réputés se trouvaient à Héliopolis, dans la pointe du Delta et à Thèbes.

Ophtalmologie et religion

L’ophtalmologie égyptienne est intimement lié à la religion. Dès l’Ancien Empire, certains papyrus rapportent l’existence de soins particuliers apportés aux yeux, soins qui sont le plus souvent associés à des rites religieux. Thot, dieu de la médecine, remit ainsi en place l’oeil qu’Horus perdit au cours d’un combat contre son oncle Seth. C’est lui aussi qui a dicté aux hommes les premiers textes médicaux aux temps les plus reculés.

Amon possédait aussi quelques pouvoirs en la matière comme semble le prouver son appellation de "médecin qui guérit l’oeil sans médicaments, qui ouvre les yeux et les redresse". Isis, elle, était capable de rendre la vue aux aveugles. Quand à l’oeil oudjat, porte-bonheur figuré sur de nombreuses peintures, il apparaît aussi sous forme d’amulettes prophylactiques porteuses d’invulnérabilité et de fertilité.

Harpiste aveugle, Leyde

Les sources de l’ophtalmologie

Les chercheurs ont trouvé de nombreuses références à l’ophtalmologie dans les textes de l’Antiquité classique ainsi que sur plusieurs gravures et bas-reliefs. L’étude des momies ainsi que celle des vases à onguent ayant contenu des collyres fournissent aussi de sérieuses indications. Mais la principale source documentaire est sans conteste les papyrus médicaux que l’on a retrouvés en nombres. Ces véritables encyclopédies médicales s’efforcé de recenser tout les maux dont souffraient les égyptiens et de leur proposer un remède.

L’égyptologue allemand Junker exhuma en 1926 des inscriptions funéraires faisant mention de médecins oculistes en plein coeur de la nécropole de Gizeh. L’un portait le titre de "médecin des yeux", l’autre était "directeur et doyen des médecins royaux, ophtalmologiste royal, directeur des maladies intestinales, chef des magiciens et des savants." Ils vivaient tout les deux à l’époque de Pépi Ier.

Le papyrus de Kahun, l’un des plus réputé, probablement rédigé sous la XIIe dynastie, consacre une place aux affections oculaires liées aux problèmes gynécologiques.

Le papyrus Edwin-Smith, exhumé à Thèbes en 1862 qui a la particularité de ne faire référence à aucun rituel magique, mentionne plusieurs complications oculaires consécutives aux traumatismes crâniens.

Le plus connu, le papyrus Ebers, fournit peut d’informations cliniques mais répertorie un grand nombre d’affection suivies de prescriptions, dont certaines concernant les yeux.

D’époque plus tardive, le papyrus de Londres, rédigé sous la XXe dynastie, destine certaines formules magiques aux maladies oculaires.

Les maladies répertoriées

Les ophtalmologistes égyptiens ignoraient probablement tout de la composition interne de l’oeil. Ils ne connaissaient pas le nerf optique, la rétine, le corps vitreux. Les problèmes oculaires n’étaient considérés que sous l’aspect de symptômes, jamais sous celui de la physiologie. Ainsi la prescription d’un remède est proposé pour "une femme qui souffre des yeux presque à n’en plus voir et ressentir des douleurs dans le cou."

Malgré cela, il paraît certain que les médecins égyptiens connaissaient nombres de maladies telles que l’hémorragie sous-conjectivale, la blépharite ciliaire, le leucome, l’inflammation conjonctivale, l’orgelet, le larmoiement... Les spécialistes actuels sont par contre plus réservé pour la cataracte.

La pharmacopée égyptienne est extrêmement variée et précise. Le papyrus Ebers cité pas moins de neuf cents recettes médicinales répertoriées. Certains collyres, qui ont laissé des traces dans les flacons, ont pu être étudiés. Leur fabrication engage un grand nombre d’éléments du règne animal comme la graisse d’oie et de porc, le lait, le miel, la bile, le foie ou la cervelle et les excréments ou les urines ! Mais aussi des éléments minéraux comme les sels de plomb, le sel marin, le sulfate de cuivre, les oxydes de cuivre et de fer, l’antimoine, la poudre de lapis-lazuli, et le sulfure d’arsenic. Enfin des composant végétaux : suc de pavot, écorce d’ébène, feuilles de lotus, d’aloès et de ricin, safran, rose ou encore gomme d’acacia et myrrhe.

Consultation divine

Voici comment est rapporté dans un texte sacré l’examen de l’oeil blessé d’Horus par le dieu  : "Le dieu vérifie l’acuité visuelle du dieu Horus. place Horus blessé à l’oeil devant un mur couvert d’un enduit clair, sur lequel sont peints un petit trait noir et un gros porc de la même couleur. Horus ferme son oeil sain (Oudjat), l’invite à regarder le trait et lui demande s’il le voit. Horus ne le voyant pas, dirige alors son regard vers le porc. Horus l’aperçoit et en conclut qu’il a conservé une vision suffisante."