Le Nouvel Empire : Thèbes et Memphis
Article mis en ligne le 21 août 2019
dernière modification le 16 août 2019

Le Nouvel Empire : Thèbes et Memphis

Thèbes, en haute Égypte, fut à son époque la plus glorieuse, celle du Nouvel Empire (vers 1550-1070 av. J.-C.), l’un des hauts lieux de l’histoire égyptienne. À Karnak, le grand temple dynastique, avec ses annexes, mériterait à lui seul une longue étude, tant sa prospection a été l’objet de travaux - et pourtant une partie considérable des ruines demande encore à être fouillée et beaucoup des vestiges dégagés ne sont pas à proprement parler publiés. De nombreux archéologues, tels G. Legrain, M. Pillet, H. Chevrier, C. Robichon, Labib Habachi, ont développé une activité inlassable ; les secteurs de recherches sont multiples depuis Karnak-Nord, où la mission de l’Institut français d’archéologie orientale a repris en 1968 les fouilles interrompues depuis 1951, jusqu’au temple de Mout, qu’explore présentement une mission américaine.

Le Centre franco-égyptien, fondé en 1967, a entrepris des travaux d’importance : relevé du décor et des inscriptions des monuments, fouilles, travaux de restauration et d’anastylose. Dans l’enceinte du temple d’Amon, qui est sans doute le site le plus étudié de toute l’Égypte pharaonique, on continue à faire des découvertes importantes. Ainsi, le môle ouest du neuvième pylône du temple, construction massive qui menaçait de s’effondrer, a été démonté pierre par pierre depuis 1968 ; dans le remplissage ont été recueillis plus de 13 000 blocs (les « talatates ») décorés de reliefs, qui provenaient d’un temple disparu, édifié à l’est de la grande enceinte de Karnak par le pharaon hérétique Aménophis IV (vers 1360 av. J.-C.) et consacré par lui à Aton, le disque solaire. Après l’échec de la révolution religieuse amarnienne, on tenta d’en faire disparaître jusqu’au souvenir ; les pierres du temple furent démontées et réutilisées par le pharaon Horemheb (vers 1330-1300 av. J.-C.) pour le remplissage du neuvième pylône.

Les talatates sont enregistrées et étudiées par les archéologues de Karnak ; leur assemblage permet peu à peu de reconstituer les parois décorées de ce temple inconnu ; des informations précieuses sont obtenues sur l’architecture, l’urbanisme et la vie dans la capitale thébaine sous la XVIIIe dynastie, et plus précisément durant la période amarnienne.

En face de Karnak, sur la rive ouest du Nil, de nombreuses missions archéologiques poursuivent des fouilles, des travaux de relevés, de nettoyage et de restauration dans les tombes ou les temples funéraires de la nécropole thébaine. Une mission de l’université de Berkeley (Californie), dirigée par K. R. Weeks, a travaillé à l’élaboration d’une nouvelle carte de l’ensemble de la nécropole en réalisant pour ce faire une prospection topographique et archéologique générale du secteur, avec des plans, des coupes et des relevés de tombes. À Deir el-Bahari, la mission polonaise, avec l’architecte Z. Wysocki et les archéologues J. Lipinska et J. Karkowski, reconstruit le célèbre temple funéraire de la reine Hatshepsout et celui de son successeur Thoutmosis III.

Dans la vallée des Reines, plusieurs tombes posent de graves problèmes de conservation. C’est le cas en particulier de la sépulture si délicatement peinte de la célèbre reine Néfertari, épouse de Ramsès II. Une mission du Centre d’étude et de documentation sur l’ancienne Égypte, dirigée par Christiane Desroches-Noblecourt, a effectué le dégagement et l’étude de plusieurs sépultures, en particulier celles de la reine Touy (no 80) et de la reine Ta-Nedjemy (no 33), monuments du Nouvel Empire qui ont beaucoup souffert de leur utilisation comme sépultures collectives à des époques postérieures.

Cependant, la nécropole thébaine ne saurait se prévaloir du monopole des tombes du Nouvel Empire. Dans l’autre capitale, Memphis, il faut mentionner la découverte importante, à Saqqara, de la tombe préparée pour Horemheb, à la fin de la XVIIIe dynastie.

On ne connaissait de cette sépulture que de magnifiques fragments de reliefs dérobés au siècle dernier et conservés dans les grands musées. Son emplacement exact a été mis en évidence par la mission conjointe de l’Egypt Exploration Society de Londres et du musée de Leyde, dirigée par G. T. Martin. Construite par Horemheb lorsqu’il n’était pas encore souverain, cette sépulture est devenue celle de son épouse, la reine Moutnedjemet. Le matériel recueilli a fourni de précieuses indications sur la fin de la XVIIIe dynastie, pour laquelle nos connaissances demeurent assez contradictoires. C’est à Saqqara encore, dans la falaise dite du Bubasteion, qu’Alain Zivie, de la mission archéologique française, a découvert les tombes de plusieurs hauts dignitaires de la fin de la XVIIIe dynastie : l’officier de marine Resh et surtout un vizir d’époque amarnienne demeuré ignoré, Aper-El ; ces deux personnages aux noms sémitiques apportent de nouveaux exemples de la montée des Asiatiques dans la société du Nouvel Empire ; de gros travaux de consolidation sont nécessaires dans cette falaise où, à plus basse époque, s’est développée une vaste nécropole de chats sacrés voués à la déesse Bastet.